(de Rabah Ameur-Zaïmèche. France, 2022, 1h52. Avec Régis Laroche, Philippe Petit, Sliman Dazi. Sélection Forum à la Berlinale 2023)

 

 

6 septembre 2023 (Magali Van Reeth) – D'une histoire de voyous qui pensaient avoir réalisé le casse parfait, Rabah Ameur-Zaïmèche fait une histoire intemporelle où la violence et le sacré se mêlent sans cesse dans le déséquilibre du monde.

 

 

Dans les films de Rabah Ameur-Zaïmèche, on ne sait jamais trop où l'on va, ni quelle direction prendra le récit mais on est toujours subjugué par la beauté des images, le soin apporté aux cadres, ouvert sur le hors-champs et la sensibilité de chaque spectateur, les acteurs atypiques mais tellement vivants, l'attention aux délaissés de nos sociétés.

 

 

 

Le Gang des Bois du Temple est bien une histoire de voleurs et de la vengeance inévitable qui les guette. Mais le film commence par un enterrement dans une église catholique, un moment de grâce accompagné par les volutes de l'encens, un chant a capela et un geste émouvant de consolation. Tout le film peut ensuite baigner dans une sorte douceur, comme un rappel de la scène d'ouverture, renforcée sans doute par les liens affectifs qui lient tous les membres de ce gang.

 

 

Il y aura peu d'explications sur le braquage, peu de dialogues pour camper la personnalité de chacun des protagonistes, peu de détails sur ce qu'il adviendra, les images suffisent et elles sont splendides, intrigantes et porteuses de sens. Rabah Ameur-Zaïmèche fait du cinéma puissant, à la fois connecté à la réalité et porté par de la pure fiction. Pour le groupe des casseurs, on retrouve les acteurs qui faisaient les disciples de Jésus dans Histoire de Judas (prix œcuménique Berlinale 2015), Sliman Dazi en petite main (mais d'une élégance ferme et discrète) d'un prince arabe et Régis Laroche pour l'énigmatique monsieur Pons.

 

 

 

Le réalisateur fait un clin d’œil aux palettes rouges de Dernier maquis (2008), soigne une bande son qui ancre totalement le récit dans l'actualité, sans jamais en faire un film à charge. Du crépitement des armes à feu au goûter de crêpes maison, on reste dans les rêves des petites gens, ceux qui voulaient juste une vie de famille tranquille, un moment de gaîté avec les copains au bistrot mais qui n'avaient pas les moyens de faire autrement. A la différence du très riche prince arabe qui peut même acheter ce qui n'est plus à vendre. Pour Rabah Ameur-Zaïmèche : ''Le Gang des Bois du Temple se révèle comme un chant du cygne dédié à la révolte des opprimés, à la noblesse du cœur et à la beauté du monde.''

 

 

 

 

Magali Van Reeth