(d'Emmanuelle Nicot. France/Belgique 2022, 1h20. Avec Zelda Samson, Alexis Manenti, Fanta Guirassi. Festival de Cannes 2022, sélection Semaine de la critique, prix Fipresci) 

 

 

22 mars 2023 (Magali Van Reeth) – Le personnage principal du film est une très jeune fille victime d'inceste. Si de nombreux films évoquent ce crime à travers des récits étouffants et des scènes difficiles à regarder, la jeune réalisatrice Emmanuelle Nicot s'attache, avec délicatesse, à la reconstruction de cette enfant déboussolée.

 

 

C'est un film sur l'inceste, un sujet terrible mais traité par la réalisatrice d'une manière toujours pudique, lumineuse. Il n'y a aucune scène de viol, aucune contrainte physique sur cette très jeune fille et aucun voyeurisme dans les images. Avec intelligence, Emmanuelle Nicot a choisi de montrer ce qui se passe après, lorsque l'enfant a été séparée de son prédateur et qu'elle doit se détacher de cette emprise criminelle et mortifère.

 

 

Depuis l'âge de 5 ans, Dalva vit avec son père. Pour elle, c'est une relation aimante, un homme protecteur dont le bon goût lui permet de s'habiller et d'agir comme une femme élégante. Lorsque brusquement, dans la première scène du film, elle est arrachée à lui, elle ne comprend pas pourquoi elle ne peut plus le voir, ni ce qu'on lui reproche.

 

Placée dans un foyer, on la surnomme tout de suite Barbie, tant sa façon de s'habiller ressemble à celle de la célèbre poupée. Elle tente de s'enfuir, méprise les autres et veut revoir son père. Le travail patient des éducateurs, l'amitié peu à peu construite avec Samia, dont elle partage la chambre, et le contact avec les autres enfants du collège vont lui permettre de découvrir un monde dont elle avait été soustraite. Lentement, elle va pouvoir s'extraire de l'emprise émotionnelle, morale et psychologique de ce père criminel. Comprendre qu'elle a été victime et non consentante.

 

La mise en scène adopte le point de vue de Dalva, s'appuyant sur une formidable jeune actrice, Zelda Samson, à l'écran du début à la fin du film. La réalisatrice trouve le bon rythme et le ton juste pour dérouler avec délicatesse le difficile chemin de cette délivrance. Sans perdre de vue l'axe de son récit, les détails se dévoilent peu à peu, les personnages ont une vraie consistance, même les plus secondaires.

 

 

Dalva, c'est le récit d'une histoire terrible racontée avec pudeur et justesse qui ne prend pas le spectateur à la gorge et ne tente pas non plus de le faire pleurer. Parce que le film parle d'une reconstruction et pas d'une destruction, Emmanuelle Nicot l'a voulu très lumineux, d'une belle lumière enveloppante, promesse de vie et d'espérance. Un premier film remarquablement maîtrisé.

 

 

 

 

 

Magali Van Reeth