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(de Baz Luhrmann. Etats-Unis, 2021, 2h39. Avec Austin Butler, Tom Hanks, Olivia DeJonge, Helen Thomson, Richard Roxburgh)
30 juin 2022 (Anne Le Cor) - Il y a quarante-cinq ans disparaissait Elvis Presley, surnommé le King, le roi du rock’n’roll. Le réalisateur australien Baz Luhrmann ose s’attaquer au mythe et présente un biopic tout simplement intituléElvis. Pourtant le King n’est pas le seul héros du film. L’histoire nous est comptée par la voix du Colonel Parker. L’énigmatique et redoutable impresario d’Elvis nous livre son point de vue sur sa place de choix auprès du King.
Le film retrace la carrière d’Elvis Presley de ses débuts à sa mort tragique en 1977. Le récit sonne comme le testament du Colonel Parker qui en profite pour se défendre face aux accusations qui sont apparues après le décès du King. Si rien n’est éludé de la vie d’Elvis - ses amours avec Priscilla, son attachement inconditionnel à sa fille Lisa-Marie, ses tentatives plutôt calamiteuses de devenir acteur à Hollywood ou son addiction aux médicaments - le film se focalise surtout sur la relation particulière entre le King et son manager surnommé le Colonel Parker. Leur interdépendance était totale, le Colonel ayant su devenir indispensable à la carrière du King malgré les désirs d’indépendance de ce dernier par moments.
Pour incarner de tels personnages il fallait deux acteurs à la hauteur. Le King se révèle dans le regard bleu azur d’Austin Butler. Bien sûr le jeune acteur américain ne ressemble pas trait pour trait à Elvis mais il s’est complètement glissé dans le costume du King. Il en a parfaitement capté les mimiques et adopté les postures dans les nombreuses scènes de concert. Quant au Colonel Parker, c’est un Tom Hanks bouffi, grossi et vieilli qui l’incarne. Il donne toutes ses facettes à ce personnage mystérieux et ambigu, le roi de l’entourloupe comme le surnomme Elvis.
Pour ajouter au jeu majestueux des acteurs il y a la mise en scène grandiose de Baz Luhrmann. Comme à son habitude le réalisateur australien nous bombarde d’une féérie d’images colorées à foison. Cet adepte de la pop culture offre un film rythmé, dynamique et sans temps mort. Il use et abuse de tous les procédés techniques du cinéma : des écrans partagés aux images incrustées en passant par des mouvements de caméra en plongée et contre-plongée, tout est fait pour créer du grand spectacle.
Le mise en scène est au service de l’histoire et de la narration. Baz Luhrmann mélange les genres et raconte même la jeunesse d’Elvis à l’aide d’une bande dessinée. Le film est parsemé de nombreux flashbacks pourtant le récit non linéaire est tout à fait cohérent. Elvisn’est pas une comédie musicale, mais l’on entend en fond sonore de certaines scènes des chansons qui reflètent les sentiments du personnage à l’écran. Bien sûr la bande son est puissante et l’on écoute avec bonheur de nombreux titres du King dont la voix envoûtante nourrit la magie de l’interprétation. C’est Austin Butler qui réalise le tour de force de chanter les chansons d’Elvis jeune. Sa voix est ensuite mêlée à celle du vrai Elvis pour interpréter ses titres phares lorsqu’il était plus âgé.
Elvis réussit à recréer un duo et une légende. Manipulateur de génie et escroc bien inspiré, le Colonel Parker plaide pour sa défense. Elvis apparaît comme un homme simple et bon à la voix d’or et habité par le rythme endiablé des musiques noires mais qui se laisse dépasser par le succès et le mythe qu’il devient de son vivant. Priscilla Presley, la veuve du King, dit le reconnaître à l’écran. Le Colonel Parker sut tirer toute le substantifique moelle de celui qui était le roi mais but le calice jusqu’à a lie.
Anne Le Cor